L’instabilité progresse au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Les événements violents et les pertes civiles augmentent. Nos outils d’aide visent à mieux comprendre les caractéristiques spatiales de la violence, pour des politiques plus contextualisées et territorialisées. La sécurité est analysée selon trois dimensions : i) l’indicateur des dynamiques spatiales des conflits (SCDi) ; ii) les frontières et iii) l’urbain/rural.
Le SCDi cartographie l’évolution temporelle et spatiale de la violence politique en Afrique du Nord et de l’Ouest depuis 1997. La région est découpée en 6 540 cellules de 50 x 50 km et plus de 60 000 événements violents dans 21 États issus des données ACLED (Armed Conflict Location and Event Data Project) sont analysées. Quatre types de conflits sont identifiés selon i) leur intensité et ii) leur concentration. Le SCDi est développé par le Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest (CSAO/OCDE) en coopération avec le Groupe de recherche sur le Sahel de l’Université de Floride. Voir code de l’indicateur ici.
Depuis 2011, la région traverse une vague de violences politiques qui surpasse celle de fin 1990 et début 2000 ; quand plusieurs conflits embrasent le golfe de Guinée, la Côte d’Ivoire, la Sierra Leone, le Libéria et la Guinée. Ces cinq dernières années sont parmi les plus violentes jamais enregistrées, ciblant de plus en plus les civils et les régions frontalières. Entre 1997-2023, on dénombre 64 827 événements violents et 229 795 décès en Afrique du Nord et de l’Ouest. L’Afrique de l’Ouest concentre 70 % de ces événements violents et 74 % des décès. La situation touche particulièrement le Sahel, avec une augmentation des organisations impliquées dans les violences.
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Entre 2021-23, cinq pays – le Nigéria, le Burkina Faso, le Mali, le Cameroun et le Niger – concentrent plus de 90 % des événements violents et victimes. Le Nigéria est le principal épicentre des violences et concentre 41 % des événements violents et 45 % des victimes d’Afrique de l’Ouest sur la période 2021-23. Trois conflits y sont en cours : i) Boko Haram dans le nord-est ; ii) les tensions entre éleveurs et agriculteurs dans la Middle Belt ; et iii) l’insurrection du Delta du Niger dans le sud. L’État de Borno, au nord-ouest est un important foyer de violences qui se diffuse aux pays voisins.
Dans le Sahel central, conflits communautaires, coups d’État et violences terroristes complexifient la situation. Les tensions maliennes se diffusent vers le Sud. Le Burkina Faso est le deuxième pays le plus affecté après le Nigéria, avec plus de 4 663 événements violents et 15 058 décès entre 2021-23. Au Niger, les événements violents et les victimes se concentrent dans la région de Tillabéri à la frontière du Burkina Faso et du Mali.
Les violences s’étendent sur la quasi-totalité des zones frontalières entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger, de Sikasso à l’ouest jusqu’au parc national du W à l’est, formant une bande de conflits de 1 200 km sur 200 km. Les cellules bleu foncé indiquent les théâtres de violences concentrées et de forte intensité.
Dans la région du lac Tchad, une longue bande de violences de forte intensité s’étire également de N’Guigmi (Niger) à Mubi (Nigéria) et Maroua (Cameroun). Les zones rurales sont particulièrement touchées avec des effets forts sur la production agricole, l’élevage et la population civile.
Quatre pays – le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Nigeria – représentent 68 % des zones nouvellement en conflit en 2022-23. Cependant, 11 % de ces zones se trouvent au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Ghana, en Guinée et au Togo, ce qui met en évidence la diffusion de la violence du Sahel vers les pays côtiers. Les événements les plus violents dans ces États en 2022-23 sont les attaques contre les civils (67 %), suivies des batailles entre groupes armés (29 %) et des explosions ou autres formes de violence à distance (4 %).